Bérengère et Vincent se marient. Tous deux issus de bonnes familles, ils ont organisé une magnifique réception à la campagne et ont décidé de s’unir devant Dieu dans une charmante petite église romane. Mais un mariage, un vrai, ce n’est jamais un conte de fées. Union de deux familles à travers celles de deux jeunes gens, il a des conséquences sociales et cristallise souvent les petites crispations familiales.

L’auteur, Blandine Le Callet, choisit donc de donner la parole à différents acteurs de cette journée : Pauline, 6 ans, petite nièce de la mariée, le prêtre, la belle sœur, la sœur, la grand-mère, l’oncle, le collègue de travail, le marié et bien sûr, la mariée. A travers ces neuf voix, chacun exprime ses envies, ses doutes, ses regrets, ses craintes, ses attentes, ses colères et ses rancoeurs autour de ce mariage ou plus précisément sur l’image que ce mariage renvoie de leurs propres vies. L’union de Bérengère et Vincent est le prétexte à un arrêt sur image, une bulle temporelle dont on profite pour faire son introspection, regarder le chemin parcouru et reconsidérer les choix effectués. C’est aussi une réunion de famille dont il faudra sortir indemne, malgré les critiques, les regards acerbes, les jugements muets mais implacables de son clan.

Le mariage, pour les mariés, c’est aussi (et parfois surtout hélas…) une logistique écrasante, une fête mondaine dont l’éclat et la réussite devront rejaillir sur les mariés, éclipsant bien souvent le fondement même de cette journée : l’engagement de deux êtres pour la vie. C’est aussi un acte symbolique très fort guidé par l’importance des conventions, l’appartenance à un certain milieu social et les choix d’avenir.

Blandine Le Callet livre donc ici un roman relativement court mais particulièrement grinçant. Il n’y a que peu de place pour l’amour finalement, tant le carcan des conventions sociales est fort, intransigeant, impitoyable même, mettant au ban ceux qui osent sortir du moule : la petite fille handicapée, l’intello qui ne sait pas se mettre en valeur, la lesbienne, la moche, la femme belle mais d’origine modeste ou le petit garçon d’honneur qui a vomi sur son joli costume et qui n’aura finalement pas sa place dans le cortège pour ne pas gâcher les photos… Chaque acteur de cette journée à conscience de jouer un rôle mais peu à peu certaines armures se fissurent et menacent de rompre tout à fait, certaines angoisses étreignent les cœurs et de lourds secrets de famille refont surface.

A déconseiller aux futurs mariés qui préparent leur cérémonie, « Une pièce montée » risque pourtant de faire écho à bien des situations vécues pour la plupart d’entre nous, tant les mots sonnent juste. Pour ma part, j’ai été particulièrement touché par le chapitre consacré à Vincent, le futur marié, si sûr de lui, si sûr de son amour et qui, quelques semaines avant le mariage, ne peut pas s’empêcher de paniquer et de se demander dans quoi il est en train de fourrer les pieds…

J’ai aimé aussi la complexité des personnages, tous si profonds, terriblement humains, parfois ignobles et pourtant au fond tellement fragiles. Ce petit roman n’est ni triste, ni gai. Il est juste, c’est tout. Et c’est ça qui le rend si dérangeant et si drôle parfois. Une lecture agréable que je recommande !

Ce livre, paru initialement chez Flammarion, a été publié en poche. Il a également fait l'objet d'une adaptation cinématographique avec Clémence Poésy et Jérémy Rénier.

Une pièce montée - Blandine LE CALLET

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