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Aventures littéraires et autres péripéties autour des livres
21 octobre 2010

Frédérick Leboyer - Pour une naissance sans violence

Pour_une_naissance_sans_violence

Pourquoi l’enfant crie t’il en venant au monde ? Ce cri, guetté et attendu, synonyme de vitalité n’est-il pas en réalité le reflet de la souffrance du nourrisson ? Ce visage crispé dans un masque de douleur ne traduit-il pas le traumatisme dont est victime l’enfant qui vient à la vie ? Et si oui, comment éviter que la venue au monde du bébé lui soit si éprouvante ? Frédérick Leboyer, gynécologue et obstétricien, interroge son lecteur, dans un ouvrage dont la première version parut en 1975 ! Sous la forme d’un dialogue avec un confrère, il soumet son raisonnement, argumente, explique et propose. A mesure que le texte progresse, il dresse un autre visage de la naissance et donc, de l’accouchement, dont les maîtres mots seraient calme, paix, sécurité et amour. Tandis que la médecine délivre les femmes de la douleur d’enfanter, ne peut-on faire de même pour l’enfant et la douleur de naître ?

Ce texte, il est sublime. C’est celui d’un médecin certes, mais surtout et avant tout d’un homme et qui plus est, d’un écrivain. Un accoucheur poète. En 1975, Frédérick Leboyer a déjà 57 ans et une longue carrière derrière lui (il est né en 1918). De son expérience et de ses réflexions jaillit un accouchement doux connu sous le nom de méthode Leboyer. Si la méthode Lamaze consiste à apprendre à la femme comment accoucher « sans douleur » en lui prodiguant notamment des notions d’anatomie, la méthode Leboyer ajoute quant à elle celle de douceur dans l’accueil du nouveau né. Adieu lumières vives et directives bruyamment exprimées, la salle d’accouchement se doit désormais d’être, autant que possible, un havre de paix, rassurant et paisible pour la mère et son enfant.

Et l’enfant, qui vient à l’instant de quitter le giron réconfortant et connu du ventre de sa maman, se doit-on de l’arracher à celle qui vient de le mettre au monde pour lui prodiguer sans attendre soins et bain ? Ne vaut-il pas mieux privilégier la rencontre entre ces deux êtres qui, pendant neuf mois se sont côtoyés, choyés et aimés avant même de se voir ? L’auteur s’insurge contre l’idée que le nouveau né ne ressent rien et prône le respect de ses sensations, imagine son angoisse, la violence d’un accueil qui l’arracherait immédiatement du sein de sa mère pour le confronter sans attendre à la batterie des examens médicaux. Il n’y a pas plus humain que cet homme !

De l’enfant qui vient au monde, on attend de lui qu’immédiatement, il respire. Lui qui depuis neuf mois puise son oxygène grâce au cordon qui le relie à sa mère. Sa mère, qui pourvoit en tout, oxygène, nourriture et cocon depuis sa conception. Et voilà qu’à peine rejoint le monde des hommes, ce précieux cordon est coupé. Comme s’il fallait détruire au plus vite ce lien désormais rompu, ce lien qui, pourtant, bat encore… Mais laissez-lui le temps à cet enfant, s’emporte l’auteur ! Pourquoi lui enlever cette béquille lorsqu’elle lui sert encore ? Tandis que l’air s’infiltre dans les poumons tout neufs, le cordon fait encore son office.

« Pour une naissance sans violence » est un plaidoyer, une requête, une supplique, une approche profondément sensible et élémentaire de la venue au monde. Il participe d’un éveil au respect de la nature, du corps et du lien d’attachement. Il revient à l’essentiel, avec des mots simples. Les termes médicaux sont bannis, ne demeure que la voix du cœur. Et parce que ces mots-là sont les plus forts, je vous en livre un extrait :

" Cet instant de la naissance,

Apprenez à le respecter.

Moment fragile, mouvement subtil,

Insaisissable autant que celui de l’éveil

Au matin.

On est entre deux mondes,

Sur un seuil.

L’enfant est là, qui hésite.

De grâce, n’allez pas le pousser !

Voulez-vous le faire tomber ?

Laissez ce petit être

Entrer comme il l’entend,

A son allure, à son rythme.

Laissez-le prendre son temps.

Voyez l’oiseau prendre son vol,

Voyez-le lourd et maladroit,

Traînant des ailes qui l’encombrent,

Voyez-le gauche et puis…

Voici qu’il vole !

Il a quitté la terre, c’est l’air qui le porte, le fait gracieux,

Léger.

Quand donc est-il passé d’un royaume dans l’autre ?

C’est si subtil que l’œil ne peut le saisir.

Subtil comme d’entrer ou de sortir du temps.

Et puis, voici la marée qui monte, imperceptible,

Irrésistible,

Et qui se met à redescendre.

A quel moment s’est-elle renversée ?

Avez-vous l’oreille assez fine

Pour entendre l’océan

respirer ?

Oui, cette naissance,

Cette vague qui se détache de la vague,

Naît de la mer sans la quitter,

N’y touchez pas avec vos mains grossières.

Vous n’entendez rien aux mystères.

L’enfant en vient,

Laissez-le faire : il sait."

Frédérick Leboyer est également connu pour avoir introduit le massage néonatal et est notamment l’auteur d’un autre ouvrage intitulé : « Shantala, un art traditionnel. Le massage des enfants ».

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Commentaires
M
Pour info:<br /> http://ame.enfant.org.free.fr/ame26.htm
I
@ Karine : c'est un trés joli texte en effet. Je te le recommande chaudement !
K
Très joli texte ! Ce livre semble très intéressant !
I
@ Sandy : tu me diras si elle a aimé !<br /> <br /> @ L'or des chambres : Bien sûr, Frédérick Leboyer évoque ici un accouchement sans difficultés ni complications. Il est évident qu'une telle approche n'est pas toujours (et de loin) possible. Mais au fond, cette vision idéale amène le lecteur à se placer à la place du bébé et rechercher avant tout son confort à lui (et celui de la mère bien entendu même si ici toute l'attention de l'auteur est tournée vers le nouveau-né). Quant à l'amour, il est essentiel ;-)
L
Oui, mais le problème c'est qu'il faut pouvoir... J'ai eu trois césariennes (pas eu le choix...) alors je ne suis pas sûre que mes enfants soient venus au monde en douceur, le deuxième a même gémi toute la première journée (de peur ou de douleur je ne le sais) même si je l'ai gardé tout ce temps là contre moi... De plus l'allaitement a été un échec les trois fois... J'ai eu toute les peines du monde à les allaiter pendant 1 ou 2 mois (pas de lait... on m'a dit que c'était à cause des césariennes...) Mais je crois que l'essentiel c'est l'amour que l'on peut leur donner les premiers mois (et après aussi bien sûr) <br /> Mais bien sûr j'aimerais bien croire que celà soit possible pour toutes les naissances, en tout cas c'est très intéressant, si seulement le personnel hospitalier pouvait lire ce genre de livre... Bon, j'arrête là mon très long comm...<br /> Bisous Isabelle et bon week end
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